LE QUéBEC DEVRAIT ACCROîTRE LES SOINS CLINIQUES EN PHARMACIE, SELON L'IEDM

MONTRÉAL — Pour améliorer l'accès aux soins de première ligne, l'Institut économique de Montréal (IEDM) estime que le Québec devrait prendre exemple sur le modèle de l'Alberta qui ouvre de plus en plus de cliniques dirigées par des pharmaciens.

Au Canada, 35 % des visites évitables aux urgences pourraient être prises en charge par des pharmaciens, affirme l'IEDM dans une étude publiée jeudi. 

Depuis son ouverture en 2022, la première clinique de pharmaciens albertaine a accueilli entre 14 600 et 21 900 patients chaque année.

Shoppers Drug Mart, qui est la propriété du géant de l’alimentation Loblaw, a annoncé au début de l'année son intention d’ouvrir 44 nouvelles cliniques de soins pharmaceutiques en Alberta en 2024, portant le nombre total à 103. 

Ces cliniques situées dans les pharmacies de la chaîne donnent accès à divers soins de santé, notamment pour le traitement du rhume, de la conjonctivite et des infections des voies urinaires. Les pharmaciens peuvent aussi gérer des maladies chroniques et la demande d’analyses en laboratoire, évaluer des blessures et des affections mineures en plus de pouvoir administrer des vaccins. 

Il existe dans d'autres provinces canadiennes, dont le Québec, un nombre limité de pharmacies qui disposent de cliniques similaires au modèle de l'Alberta.

Bien que pour le moment le Québec ne possède qu'une poignée de cliniques de soins pharmaceutiques, le président l'Ordre des pharmaciens du Québec (OPQ), Jean-François Desgagné, souligne que les pharmaciens de la province effectuent déjà à peu près les mêmes tâches que leurs homologues albertains. 

«Les deux provinces au Canada où les pharmaciens ont des opportunités professionnelles les plus élargies sont le Québec et l’Alberta», a soutenu en entrevue M. Desgagné. 

Les pharmaciens québécois ont déjà un rôle dans ce qui touche les conditions mineures. «(Ils) le font déjà, on n’a pas besoin d’ajustement réglementaire là-dessus», dit-il. 

Ils n'ont pas non plus de limite d'analyses en laboratoire, ils doivent seulement être capables d'analyser les résultats. 

M. Desgagné a mis de l'avant qu’en 2023 les pharmaciens du Québec ont réalisé 1,7 million d’interventions dans des cas de conditions mineures. Ils ont également rédigé 5,5 millions d’ordonnances en 2022, ce qui peut inclure des prolongations d'ordonnance ou encore des amorces de thérapies pour des cas mineurs. 

À savoir si le Québec devrait mettre en place un réseau de cliniques de soins pharmaceutiques, le président de l'OPQ se montre ouvert à «tout ce qui peut améliorer l'accès à la première ligne». 

«On est dans une profession qui a évolué à vitesse grand V et qui va continuer d’évoluer. On est ouvert, que ce soit des cliniques ou des pharmaciens encore plus engagés», a-t-il commenté. 

Toutes les pharmacies au Québec ont des espaces confidentiels. «Est-ce qu’on va avoir recours de plus en plus à ces espaces? Définitivement, affirme M. Desgagné. Si éventuellement il y a des besoins pour avoir des structures particulières, on n'est aucunement fermé à cela.»

Dans un communiqué de presse, Krystle Wittevrongel, analyste senior en politiques publiques et leader du Projet Alberta à l’IEDM, a fait valoir que «les pharmaciens ont une meilleure connaissance des médicaments que n’importe quel autre intervenant de nos systèmes de santé». 

Visites évitées aux urgences 

Plus tôt cette année, le gouvernement de l’Alberta a vanté que l’expansion des cliniques de soins pharmaceutiques dans toute la province a contribué à réduire la pression exercée sur les services d’urgence et les médecins de famille. 

M. Wittevrongel estime qu'en «débloquant leur plein potentiel» les pharmaciens œuvrant en clinique en Alberta ont permis «d’éviter des dizaines de milliers de visites inutiles aux urgences».

Il est difficile d'évaluer combien de visites aux urgences ont été évitées, selon le président de l'OPQ. Il réitère que 1,7 million de personnes se sont présentées en pharmacie et ont été prises en charge. «Elles ont, soit pas eu besoin de consulter à l'urgence, pas eu besoin de consulter leur médecin de famille ou pas eu besoin de demander un rendez-vous», explique-t-il. 

Le gouvernement du Québec pourrait cependant en faire davantage pour «permettre aux pharmaciens d’exploiter leur talent et être au service de la population de façon plus élargie».

L'Ordre a fait des propositions au ministre de la Santé, a indiqué M. Desgagné, dont la demande de lever des contraintes à l'accès.Par exemple, il a raconté que cela lui prend plus de temps d'expliquer à une patiente qui a une infection urinaire, mais qui n'a pas eu de diagnostic initial, que cela lui aurait pris pour la soigner lui-même.Cette situation peut facilement être corrigée selon lui. 

Il est convaincu que la possibilité de référence pour un pharmacien pourrait aussi améliorer le parcours de soins du patient. «Si j’arrive au bout de ce que je peux faire, (...) la dernière chose que tu veux c’est de dire (à un patient) vous allez devoir aller à l’urgence», illustre-t-il. Le référencement éviterait ainsi que le patient «retombe au bas de la pyramide». 

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Katrine Desautels, La Presse Canadienne

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