RéAMéNAGEMENT D'UN CENTRE JEUNESSE DE MONTRéAL QUI SE VEUT MOINS INSTITUTIONNALISé

MONTRÉAL — Avoir des unités au goût du jour dans les centres jeunesse peut avoir des impacts positifs non seulement pour les jeunes, mais aussi pour la rétention des éducatrices qui se dévouent pour ces jeunes.

Alors que plusieurs installations de la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) sont vétustes au Québec, le Centre de réadaptation pour les jeunes en difficulté d’adaptation Dominique-Savio, situé dans le quartier Ahuntsic, à Montréal, sera rénové. La construction devrait débuter cette semaine.

La pénurie de personnel sévit chez les éducatrices en centre jeunesse, comme dans plusieurs autres métiers des services sociaux. La rénovation de leur lieu de travail pourrait avoir un impact positif sur la rétention des employés. «Je pense que ça va améliorer le climat de travail qui est par ailleurs très bon», a mentionné Julie Lauzon, directrice adjointe programme jeunesse au CIUSSS Centre-Sud.

Le projet de 68,9 millions $ comprendra la construction d’une nouvelle aile qui abritera quatre unités de vie ainsi que le réaménagement de deux unités qui répondront désormais aux critères permettant d'accueillir des adolescentes placées sous la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents.

«C’est une unité qui va servir entre autres pour les jeunes en garde fermée, donc avec des portes barrées, qui nécessitent des niveaux de sécurité un petit peu plus importants que le reste de notre clientèle, a fait savoir Martine Richer, cheffe réadaptation au sein du CIUSSS Centre-Sud. À Montréal, ça n’existe pas pour les filles actuellement, donc on avait ce besoin d’avoir une unité sécuritaire sur notre site.»

Présentement, il y a 65 adolescentes montréalaises qui habitent dans une unité de vie fermée à Laval. Lorsque le projet de réaménagement sera terminé, ce qui est prévu en 2026, elles seront rapatriées à Montréal, au centre Dominique-Savio.

Ce centre a été construit en 1960 et il héberge une clientèle de garçons et de filles de 6 à 11 ans ainsi que des adolescentes de 12 à 17 ans.

Recommandation de la Commission Laurent

Les balbutiements du projet de réfection du centre Dominique-Savio ont débuté en 2008. Le projet a souvent été modifié, jusqu'à récemment, pour répondre aux recommandations de la Commission Laurent: la commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse qui est née à la suite du décès tragique de la fillette de Granby, il y a cinq ans. Le projet répond notamment au besoin d'humaniser les services de réadaptation de la Commission.

«Le sens du projet c’est vraiment offrir des milieux qui sont des plus chaleureux que ce qui existe déjà. Des unités qui seront de meilleures unités pour ces jeunes, qui correspondent beaucoup plus à ce que la réadaptation est devenue avec le temps. (…) Ce qu’on souhaite, c'est que nos jeunes soient le moins institutionnalisés», a déclaré Mme Richer.

Les adolescentes pourront par ailleurs rester dans le centre pendant les travaux. «On est très contente de ne pas avoir à déraciner des jeunes et des enfants qui, déjà, ont connu plusieurs mouvements», a commenté Mme Lauzon.

Les jeunes ont également participé à l'élaboration des plans avec les architectes. On leur a demandé: s’il y avait un milieu d’hébergement idéal pour elles, à quoi ressemblerait-il?

«La plupart de nos unités, présentement, ont des portes fermées, ce sont des espaces un peu clos — qui nous permettent de l’intimité, il y a d’autres idées derrière cela — mais là, les jeunes nous disaient: "dans une vraie maison, ce n’est pas vrai que le salon, la cuisine, c’est tout barré, fermé avec une porte. On aimerait avoir des aires plus ouvertes, des espaces qui nous feraient penser qu’on est dans une maison", a relaté Mme Richer. On s’est vraiment inspiré de cela jusque dans notre mobilier, dans les couleurs, le choix des matériaux, etc.»

Dans la nouvelle aile, la structure a été pensée pour éviter de faire passer les jeunes par la réception, ce qui leur «rappelle toujours qu'ils sont dans un centre jeunesse».

«Donc il y a cette espèce de confiance et liberté qui fait qu'on se sent chez soi et on se sent peut-être un peu moins enfermé», estime Mme Richer.

Il y a aussi l'ajout d'une nouvelle salle de sport et une salle d’apaisement comme on en retrouve dans les autres unités.

Mme Lauzon pense que cela fera une différence pour les jeunes. Elle a expliqué que dans plusieurs cas de fugue, la jeune personne veut simplement se retrouver dans un endroit où elle peut prendre un pas de distance avec une situation. «Je ne sais pas si ça va diminuer le nombre de fugues, mais assurément, nos jeunes, ce qu'ils souhaitent quand on leur pose la question, c'est de se sentir un peu comme à la maison. Et nous, ce qu'on souhaite dans notre vision, c'est leur offrir un milieu qui va être beaucoup moins institutionnalisé», a dit Mme Lauzon.

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Katrine Desautels, La Presse Canadienne

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